Les dessins de brevet en quelques points

En Suisse, et par exemple en Allemagne aussi, une demande de brevet ne doit pas forcément contenir de dessins. Cependant, ceux-ci facilitent l’appréciation de l’invention par l’examinateur, ce qui s'inscrit également dans l’intérêt de l’inventeur. En effet, plus une innovation est complexe, plus il est difficile de se l’imaginer sur la base d’une description. « Décrire le fonctionnement d’un mouvement d’horlogerie seulement par des mots est un exercice ardu », déclare Simon Straessle, expert en brevets à l’IPI qui serait d'ailleurs favorable au recours à des représentations 3D ou à des films. Dans d’autres pays, comme aux États-Unis, une illustration est impérativement requise. Joindre d’emblée un dessin évite de devoir s’en occuper plus tard si l'on décide d'étendre la protection aux États-Unis.

Tobias Maas de la société maas Ι Patente & Konstruktionen et son équipe jouissent d’une longue expérience dans le domaine des dessins de brevet. Installée à Friedrichshafen, dans le sud de l’Allemagne, la société élabore des dessins pour des inventeurs indépendants, des entreprises et des cabinets de conseils en brevets. « Nous recevons des croquis de bonne qualité ou de simples premiers jets. En fonction de l’urgence, une capture d’écran réalisée à partir d’une présentation PowerPoint doit parfois faire l’affaire », confie Tobias Maas. Le prototype fourni par l’entreprise sert souvent de base pour le dessin.

Les inventeurs indépendants ont besoin d’être particulièrement encadrés car il est fréquent qu’ils ne sachent pas ce qu’un dessin doit contenir. « S’ils ne font pas attention, ils dévoilent des détails qui ne sont pas décrits dans le fascicule. Tout élément « supplémentaire » ne pourra plus être breveté dans l'éventualité d’une deuxième invention puisqu’il a déjà été publié. Tout l’art consiste à dessiner uniquement ce qui est essentiel à la compréhension de l’invention. Pour les inventeurs indépendants, il est donc recommandé de solliciter l’aide d'un expert avant de déposer une demande de brevet. »

Les dessins doivent être exécutés selon des instructions précises. Ils doivent être en noir et blanc et respecter certaines dimensions. En fonction de la complexité de l’invention, le dessin est réalisé en l’espace de deux à six heures. Dans le cas d’inventions particulièrement exigeantes, une vingtaine d’heures peuvent s’avérer nécessaires. Il s’agit notamment de diagrammes compliqués du domaine de l’électrotechnique comprenant plusieurs niveaux et courbes.

Les instructions claires n’empêchent pas l’expression de la créativité : « Le style de chacun transparaît dans nos dessins. Nous utilisons la CAO - la conception assistée par ordinateur - de manière plutôt souple. Parfois nous trichons un peu pour obtenir de meilleurs résultats », révèle Tobias Maas. Par le passé, les experts consacraient de nombreuses heures aux dessins. Aujourd’hui, les illustrations sont fortement simplifiées. « Une voiture est représentée comme une boîte rectangulaire, plusieurs lignes évoquent un arbre, une représentation schématique suffit généralement », ajoute le spécialiste. La signature personnelle se révèle dans les différentes épaisseurs des traits ou dans un certain style de représentation des figures ou des machines. « Nous ne pouvons pas modifier les points essentiels d’une invention, mais tout le reste, par exemple les éléments contextuels », explique Tobias Maas.

Tous les membres de l’équipe sont des dessinateurs techniques diplômés. Pour travailler dans le domaine des brevets, il faut avoir une bonne conception de l’espace, de l’imagination et un zeste de créativité. Les perfectionnistes doivent revoir leur approche : « Un dessin de brevet ne montre jamais tout parfaitement et ne correspond pas non plus toujours à 100 % aux normes techniques », indique Tobias Mass, incitant à la réflexion. Il faut savoir tolérer de petites imprécisions. Mais le plaisir l’emporte clairement : « Nous découvrons toujours les innovations les plus récentes et contribuons par nos dessins au succès d’une demande de brevet. » Les évolutions se reflètent directement dans les dessins : « On s’écarte de plus en plus des typiques dessins de brevet techniques, comme ceux de turbines. Aujourd'hui, nous recevons nettement plus de brevets de procédés pour des gestes manuels, des systèmes de caméra, qui saisissent des panneaux et des choses de ce genre », dit Tobias Maas.